La surchauffe du débat public au Sénégal, la scène hideuse à l’assemblée nationale entre son Président et un député, les agitations de certains compatriotes à Genève et à Paris pour marquer leurs indignations constituent des ingrédients pour une introspection des différents acteurs. Une voix plus autorisée que la mienne a déjà alerté sur les dérives qui guettent notre très cher pays.
Il est clair que la reddition des comptes devrait être une banalité dans une démocratie. Toutefois, cette pratique normale d’évaluation des politiques publiques doit être comprise par l’ensemble des acteurs. Qu’est ce que c’est que l’évaluation d’une politique publique ? Qu’est ce qu’elle doit être ? Et qu’est ce qu’elle ne devrait pas être ? La réponse à ces questions pourrait nous éclairer sur la marche à suivre et sur la compréhension du débat actuel.
La prudence intellectuelle nous oblige à circonscrire les faits sur la caisse d’avance de la commune de Dakar à une simple banalité.
A la lumière de nos informations cette caisse est un fond dérogatoire accordé à la collectivité pour faire face à des dépenses « sociétales ». On peut comprendre dans un pays où l’élu devient un professionnel de la politique soit confronté à un problème simple : Comment faire face aux nombreuses sollicitations des concitoyens ? L’esprit de cette dérogation se trouve dans ce dilemme : la quête aux suffrages repose sur des promesses à un peuple de plus en plus paupérisé et qui trouve dans l’engagement politique un moyen d’exister et de paraitre. De là prend naissance « la société d’accaparement » et ses effets nocifs sur la bonne gouvernance.
La faute est donc partagée, et tous les responsables doivent payer. Le terrorisme judiciaire n’y fera rien, si on ne change pas notre manière de faire la politique.
Venons en aux faits : l’autorisation est donnée à l’édile de Dakar d’utiliser ses fonds et de justifier après (un contrôle à postériori). L’erreur se trouve donc dans la règle. En effet, justifier à postériori signifie simplement de fournir les pièces comptables de règlement des montants. Le reste est de la pure spéculation car le contrôle de légalité s’arrête là. Le Maire a donc parfaitement raison de dire que la motivation se trouve ailleurs.
De plus, cette volonté de pousser le Maire à publier la liste des bénéficiaires est un précédent dangereux pour notre pays. Suivez mon regard ! Je précise que j’en suis pas un et que je ne l’ai jamais croisé.
Le problème est donc plus complexe et pose la question de l’évaluation des politiques publiques.
Sur le « marché » de l’évaluation de politique, nombreuses sont les définitions proposées par les uns et les autres. Citons – en quelques unes parmi les plus significatives :
- Evaluer une politique publique c’est reconnaitre et mesurer ses effets propres (Rapport Deleau) ;
- Evaluer une politique publique c’est émettre un jugement sur la valeur de cette action ( Rapport Viveret) ;
- L’évaluation d’une politique publique c’est « l’appréciation portée sur l’efficacité d’un programme, d’une politique ou d’une action publique à la suite de la recherche, scientifiquement exigeante, de leurs effets réels, au regard des objectifs (affichés ou implicites) et des moyens mis en œuvre » (cours des comptes française).
Au-delà de la recherche naturelle de référentiels stables ou de paradigmes, caractéristique d’une discipline toujours en voie de consolidation, le débat actuel sur la « caisse d’avance » se rapprocherait de la dernière conception de l’évaluation. Cette définition sous tend alors un débat de fond sur l’efficacité et l’efficience de cette caisse eu égard à la finalité même de l’action publique dans un Etat- démocratique.
A l’évidence, la distinction ainsi opérée aura une influence déterminante sur la stratégie évaluative mise en œuvre.. Sur le plan méthodologique, les partisans de la première approche privilégieront l’analyse du cheminement, du processus caractéristique de la politique publique. D’autres, tout en intégrant cet aspect à des fins explicatives, mettront l’accent sur la mesure des effets. Une discussion s’est ainsi instaurée entre, notamment, sociologues de l’action publique, politologues et économistes.
On le voit l’évaluation des politiques publiques suscite encore des débats nombreux ; ce faisant elle acquiert un certain droit de cité dans notre pays depuis 2012. En respectant la procédure judiciaire en cours mais en refusant aussi de se dérober comme le Premier Ministre et surtout se fondant sur les définitions susvisées, on peut dire, que la place du Maire n’est pas devant le tribunal, car ce qui est fondamental dans un exercice d’évaluation est d’engager l’appareil politico- administratif concerné sur la voie féconde de l’apprentissage continu et pour ce faire, seul un travail de questionnement permettra d’éclairer les résultats obtenus par cette caisse « d’avance ». Dans une prochaine intervention nous reviendrons sur l’évaluation de politique en tant que système de contrôle et de manière plus technique, aux stratégies d’évaluation.
Dr Bassirou NIANG, drbassirou@gmail.com
Il est clair que la reddition des comptes devrait être une banalité dans une démocratie. Toutefois, cette pratique normale d’évaluation des politiques publiques doit être comprise par l’ensemble des acteurs. Qu’est ce que c’est que l’évaluation d’une politique publique ? Qu’est ce qu’elle doit être ? Et qu’est ce qu’elle ne devrait pas être ? La réponse à ces questions pourrait nous éclairer sur la marche à suivre et sur la compréhension du débat actuel.
La prudence intellectuelle nous oblige à circonscrire les faits sur la caisse d’avance de la commune de Dakar à une simple banalité.
A la lumière de nos informations cette caisse est un fond dérogatoire accordé à la collectivité pour faire face à des dépenses « sociétales ». On peut comprendre dans un pays où l’élu devient un professionnel de la politique soit confronté à un problème simple : Comment faire face aux nombreuses sollicitations des concitoyens ? L’esprit de cette dérogation se trouve dans ce dilemme : la quête aux suffrages repose sur des promesses à un peuple de plus en plus paupérisé et qui trouve dans l’engagement politique un moyen d’exister et de paraitre. De là prend naissance « la société d’accaparement » et ses effets nocifs sur la bonne gouvernance.
La faute est donc partagée, et tous les responsables doivent payer. Le terrorisme judiciaire n’y fera rien, si on ne change pas notre manière de faire la politique.
Venons en aux faits : l’autorisation est donnée à l’édile de Dakar d’utiliser ses fonds et de justifier après (un contrôle à postériori). L’erreur se trouve donc dans la règle. En effet, justifier à postériori signifie simplement de fournir les pièces comptables de règlement des montants. Le reste est de la pure spéculation car le contrôle de légalité s’arrête là. Le Maire a donc parfaitement raison de dire que la motivation se trouve ailleurs.
De plus, cette volonté de pousser le Maire à publier la liste des bénéficiaires est un précédent dangereux pour notre pays. Suivez mon regard ! Je précise que j’en suis pas un et que je ne l’ai jamais croisé.
Le problème est donc plus complexe et pose la question de l’évaluation des politiques publiques.
Sur le « marché » de l’évaluation de politique, nombreuses sont les définitions proposées par les uns et les autres. Citons – en quelques unes parmi les plus significatives :
- Evaluer une politique publique c’est reconnaitre et mesurer ses effets propres (Rapport Deleau) ;
- Evaluer une politique publique c’est émettre un jugement sur la valeur de cette action ( Rapport Viveret) ;
- L’évaluation d’une politique publique c’est « l’appréciation portée sur l’efficacité d’un programme, d’une politique ou d’une action publique à la suite de la recherche, scientifiquement exigeante, de leurs effets réels, au regard des objectifs (affichés ou implicites) et des moyens mis en œuvre » (cours des comptes française).
Au-delà de la recherche naturelle de référentiels stables ou de paradigmes, caractéristique d’une discipline toujours en voie de consolidation, le débat actuel sur la « caisse d’avance » se rapprocherait de la dernière conception de l’évaluation. Cette définition sous tend alors un débat de fond sur l’efficacité et l’efficience de cette caisse eu égard à la finalité même de l’action publique dans un Etat- démocratique.
A l’évidence, la distinction ainsi opérée aura une influence déterminante sur la stratégie évaluative mise en œuvre.. Sur le plan méthodologique, les partisans de la première approche privilégieront l’analyse du cheminement, du processus caractéristique de la politique publique. D’autres, tout en intégrant cet aspect à des fins explicatives, mettront l’accent sur la mesure des effets. Une discussion s’est ainsi instaurée entre, notamment, sociologues de l’action publique, politologues et économistes.
On le voit l’évaluation des politiques publiques suscite encore des débats nombreux ; ce faisant elle acquiert un certain droit de cité dans notre pays depuis 2012. En respectant la procédure judiciaire en cours mais en refusant aussi de se dérober comme le Premier Ministre et surtout se fondant sur les définitions susvisées, on peut dire, que la place du Maire n’est pas devant le tribunal, car ce qui est fondamental dans un exercice d’évaluation est d’engager l’appareil politico- administratif concerné sur la voie féconde de l’apprentissage continu et pour ce faire, seul un travail de questionnement permettra d’éclairer les résultats obtenus par cette caisse « d’avance ». Dans une prochaine intervention nous reviendrons sur l’évaluation de politique en tant que système de contrôle et de manière plus technique, aux stratégies d’évaluation.
Dr Bassirou NIANG, drbassirou@gmail.com
Autres articles
-
Tambacounda / Aliou Mamadou Dia s'engage à créer l'Université des métiers
-
Le directoire de campagne d’Amadou Bâ fait le bilan d’étape, affiche la confiance et lance une pique à l’opposition
-
Dettes fiscales pour les entreprises de presse : Le président Macky Sall promet l’effacement pour la période antérieure au 31 décembre 2023
-
Campagne présidentielle/Kolda : Aliou Mamadou Dia(candidat/PUR) " notre combat est le développement du Sénégal...Kolda n'a aucune usine..."
-
Campagne présidentielle à Kolda : La caravane du PUR (coalition AMD2024) bloquée par la gendarmerie pour ressemblance de casquette...