EMMANUEL MACRON OU LE RÉCIT DE VOYAGE DU COLON AU G20


EMMANUEL MACRON OU LE RÉCIT DE VOYAGE DU COLON AU G20
En marge du Sommet du G20 tenu à Hambourg en Allemagne, le président de la République française, Emmanuel MACRON, répondant à une question farfelue moyenâgeuse d’un journaliste, a dit : «le défi de l’Afrique est civilisationnel». Ensuite, il plonge sur une longue liste de maux qu’il colle à l’Afrique. L’aisance et le courage avec lesquels il a formulé son jugement de valeur sont  évocateurs de la nature des relations entre la France et ses colonies, pardon, ses anciennes colonies. 
Les jugements globaux sont horribles et relèvent d’une démarche hâtive, simpliste dénudée de rigueur intellectuelle. Comment peut-on compresser tout un continent, 54 Etats, dans le même panier lugubre. Cela relève d’une méconnaissance totale des diversités qui font le charme de l’Afrique, à moins que l’on soit guidé par d’autres motifs.
Sur « le défi civilisationnel »
« Le défi de l’Afrique est civilisationnel », le contenu est si pestilentiel pour dépasser le mépris et l’insulte à l’endroit de tous les peuples d’Afrique. Le panier caricatural est ouvert à tous les péchés sociétaux imaginables, puisque Emmanuel MACRON a délibérément placé le terme défi devant le qualificatif « civilisationnel ». 
Selon le Larousse la civilisation c’est « l’ensemble des caractères propres à la vie intellectuelle, artistique, morale, sociale et matérielle d'un pays ou d'une société ». De ce point de vue, il n’y a pas une civilisation, il n’y a que des civilisations. Alors pour MACRON, quelle est la « référence civilisationnelle » ? Certainement, il répondra que c’est la civilisation occidentale. Ce qui constitue une négation impérialiste des droits des autres peuples à avoir une expression culturelle, morale, sociale, sociétale, intellectuelle etc. 
Pour beaucoup d’occidentaux la valeur est occidentale. Toutes expressions sociétales ou options politiques qui ne seraient pas de leur giron sont anti-modèles et sans valeur. Négation, carence, impérialisme ne sauraient être plus poussées. Si les africains continuent à nourrir un complexe, ils perdraient toutes identités et seront happés dans « la gueule du prétexte de globalisation ».  Au moment où les autres, sur l’alibi super flou de « valeurs de la république », verrouillent leur soi-disant identité. 
C’est aux peuples et dirigeants africains de refuser cet impérialisme sanguinaire qui phagocyte toute différence. Nous devons revisiter toutes ces notions de démocratie, de liberté, de droit de l’homme et autres droits spécifiés pour les adapter à nos réalités, pour éviter la domination. Le Président Alpha Condé en a récemment martelé le défi. Ce qui est une valeur pour vous ne l’est pas forcément pour nous. Refuser la différence est une attitude de faiblesse ! 
Dans les civilisations africaines le mariage homosexuel est une abomination, un des pires « défis civilisationnels » de l’Occident. Alors laisser nous avec notre civilisation reproductive et protectrice de la race humaine.
Sur la transition démographique
C’est faux ! Le nombre d’enfants par femme en Afrique n’est pas entre 7 et 8. La moyenne africaine est de 4,2 enfants par femme. C’est seulement au Niger où on enregistre une moyenne de 7,2 enfants par femme (La tribune Afrique).  Au Sénégal l’indice synthétique de fécondité se situe à 5,03 (ANSD, 2017).
Peut-on préférer des bras valides aux bras mous, dont les charges sont insupportables ? En France, « les dépenses liées à la prise en charge des personnes âgées dépendantes augmenteront de 80% d'ici à 2060, selon les dernières projections actualisées de la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees). Elles culmineront ainsi à 51,6 milliards d'euros en 2060, dont 35 milliards de dépenses publiques, contre 28,3 milliards en 2011 » (Le Figaro, 01/03/2014). Au-delà même des raisons économiques aucun pays africain ne vous envie une telle porosité démographique, ce fardeau.
Monsieur le Président le Président, nous vous signalons au passage que, si tous les Hommes de la planète adoptèrent, en même temps, votre choix (si c’est un choix) de ne pas avoir d’enfant, à l’espace d’un siècle et demi la rare humaine disparaitrait totalement sur terre.
La civilisation occidentale accepte la construction de maisons de retraite, des mouroirs. Alors qu’en Afrique, toutes les civilisations rejettent totalement cette politique. Aux yeux de l’africain, ces mouroirs sont des « défis civilisationnels ».  
Contrairement au vieillissement, la jeunesse est un atout pour les pays africains et les spécialistes parlent désormais de dividendes démographiques.
Sur le trafic d’êtres humains
L’un des crimes les plus odieux, l’esclavage, fut organisé par l’Occident. Pendant trois siècles et demi, l’Afrique fut vidée de ses bras valides, déportés vers l’Amérique par des négriers européens. Les guerres et les razzias qui accompagnèrent la traite négrière ont déstructuré toutes les sociétés et économies africaines qui n’avaient rien n’à envier à l’occident au démarrage de cette barbarie au XVème siècle.
La France était au cœur de ce sinistre triangle du commerce d’êtres humains. Au total, 17 ports participèrent à plus de 3300 expéditions négrières, et Nantes, avec 42% de la traite, fut le principal port négrier français. Par ailleurs, d’autres ports ont participé à l’armement de navires négriers : la Rochelle, Le Havre, Bordeaux, Saint-Malo, Lorient, Honfleur et même Marseille (Source : Diffusion photo Magazine). Alors, toute une économie bâtie sur le trafic d’êtres humains, c’est une civilisation ça ? Vraiment, on oublie très rapidement !
Je serais époumoné et le lecteur serait suffoqué, si je tentais d’apporter des réponses au chapelet de problèmes qu’attribue à l’Afrique.
Les propos discourtois ne traduisent que la nature des relations que nos dirigeants entretiennent avec la France et il faudra que le regard change.
L’ère des aides, dons ou soi-disant enveloppes pour un Plan Marshall est révolue. L’Afrique et les africains doivent prendre leur destin en main et saisir les opportunités dans notre continent en restant ouvert au monde. Le développement de l’Afrique se fera par et pour les africains. 
Le regard que les autres porteront sur l’Afrique dépendra toujours du comportement et de l’attitude des africains. C’est à la jeunesse de relever le défi.



Momath Talla NDAO
Adresse : Kaffrine
momathtalla@yahoo.fr
 
Mardi 18 Juillet 2017




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