Dialogue avorté entre pouvoir et opposition significative : le théâtre du boycott de 2007 en répétition ?


Ce 21 novembre, retenu comme le jour de démarrage du deuxième « Dialogue politique », après l’esquisse ratée de mai 2016, ne fera pas partie des grandes dates de la chronologie politique du Sénégal indépendant, comme en est le 17 mai 1988, coïncidant avec la célébration de la Korité, qui marquera le point de départ vers le réchauffement des relations entre Abdou Diouf et Abdoulaye Wade, débouchant sur le Code consensuel de 1992 et la mise en place d’un Gouvernement de majorité présidentielle élargie en mars 1991. Les plus grands leaders de l’opposition étaient ce matin, dans les douceurs élyséennes de Ngor Diarama, assis sur des chaises vides et y ont brillé par leur absence plus que remarquable. Ironie de l’Histoire : Aly Ngouille Ndiaye s’est vu proposé la constitution d’un quatrième pôle par des partis poids-plume, comme si on voulait ajouter à la comédie le fou rire d’un bouffon de trop qui s’invite au « bal des masqués » pour meubler le décor.
Pour rappel, pendant longtemps avant le dernier remaniement ministériel, le départ de Abdoulaye Daouda Diallo du ministère de l’Intérieur était la principale revendication de l’opposition significative, qui ne manque jamais l’occasion de rappeler à Macky Sall que Diouf et Wade avaient désigné des profils plus consensuels pour organiser les élections, respectivement, de 2000 et de 2012, en l’occurrence le général Lamine Cissé et l’inspecteur général d’Etat Cheikh Guèye.
En réalité, c’est moins la tête du ministre qui comptait que le profil de l’autorité en charge de l’organisation des élections au Sénégal qui dérangeait cette opposition. A cet égard, le choix porté sur Aly Ngouille Ndiaye pour diriger la Place Washington n’aura pas permis de passer de la grisaille de la contestation à l’embellie de la concertation.
Pourtant, le Président Wade, au lendemain des Législatives du 30 juillet, avait averti son monde en déclarant qu’il ne va plus assister à une élection (à un dialogue ?) organisé par un ministre encarté Apr. Qui plus est, la mise à l’écart de Karim Wade, candidat désigné du Pds à la prochaine présidentielle, est une autre pomme de discorde, que les récents pourparlers en sous-main, quoique démentis, entre le parti libéral et l’Apr n’ont pas pu trancher.
Il y a aussi la donne Khalifa Sall, dont l’emprisonnement est la principale explication à l’absence de Manko Taxawu Senegaal (qui compte aussi dans ses rangs Idy et Gackou) de ses concertations.
On est d’autant plus prédisposé à une vision sombre de l’avenir que pas plus tard qu’hier, le chef de l’Etat, en marge du Conseil présidentiel sur l’investissement, a pris acte de la bouderie de l’opposition significative en des termes qui indiquent qu’il n’est pas frais et dispos pour scier la branche sur laquelle il assis.  
Devant pareille expectative où personne ne veut lâcher du lest, on peut dire que c’est le scénario de 2007 qui se redessine quand l’opposition significative à Wade avait boycotté les Législatives après avoir contesté la présidentielle de la même année.
Autre signe du destin : à l’époque, Me Wade avait nommé Cheikh Tidiane Sy ministre de l’Intérieur en remplacement du très zélé Me Ousmane  Ngom. Ce qui était alors perçu comme une mesure d’apaisement n’était qu’un motif de radicalisation de l’opposition qui se réunira autour des Assises nationales pour imprimer à sa démarche la cadence qui la mènera à la manifestation du 23 juin 2011.  
C’est dire, en définitive, que la machine du dialogue tombe en panne au Sénégal à quinze mois de la présidentielle. Pour la remettre en marche, il faut nécessairement  l’implication d’acteurs à égale distance des deux camps. Mais qui ? 
Mardi 21 Novembre 2017




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