Brûlot de Aziz N'daw : Mensonge d'Etat


Brûlot de Aziz N'daw : Mensonge d'Etat
C’est dans le journal l’« As » du lendemain matin que j’appris que j’avais été relevé de mes fonctions de Haut Commandant en Second de la Gendarmerie, pour intempérance, mauvaise conduite et indiscrétion.

L’entrefilet était signé d’un journaliste du nom de Cheikh Mbacké GUISSE, que je ne connaissais ni d’Eve ni d’Adam. Les jeunes de Fass, notamment Niang Faye, ami de ma famille, homme de confiance, compagnon et habitué de ma maison, décidèrent de coincer le journaliste, pour explication sur son entrefilet.
Cheikh Mbacké GUISSE leur expliqua avoir reçu un coup de fil du Cabinet du Général, qui lui avait donné l’information. Sa source étant officielle, il n’avait pas à vérifier ni la teneur ni non plus l’exactitude.

Cet entrefilet me blessa profondément et surtout blessa mes enfants. Je n’ai jamais caché prendre de l’alcool mais je défie quiconque de prouver m’avoir connu intempérant. Après plus de trente ans de service, et avec de grandes responsabilités dans différentes postures de la République, il était idiot comme dégueulasse de me traiter d’intempérant. J’assume prendre mon pot, mais je prends mon pot dans des endroits décents, avec des personnes décentes et responsables et, la plupart du temps, au Mess des Officiers.

Le Colonel TINE vint me rendre compte de la liaison entre son compte rendu du week-end concernant l’arrestation d’agents des Services Présidentiels et ma relève. Je ne pouvais comprendre et personne, surtout pas mon ex- patron, ne voulait m’expliquer ce qui se passait ou ce qui s’était passé. Le Chef d’Etat-Major Général, que je sollicitais, me répondit ignorer la raison de mon renvoi. Je pris le taureau par les cornes et m’adressai à mon ancien service, la Direction de la Documentation et de la Sécurité Extérieure.

Ceux-ci me mirent en rapport avec les Commissaires du Bureau de Sécurité Présidentielle, qui me remirent le rapport établi par les services du PDS contre le Général Abdoulaye FALL, Ils me firent comprendre que mon affaire était liée à ce rapport et à l’attaque de la Gendarmerie contre les services du nommé Insa DIALLO. Les Policiers me mirent en rapport avec le jeune Amdy, franc-tireur du PDS, homme de main d’Insa Diallo et souvent garde de corps d’Oulimata DIOUM. Amdy acceptait de me parler uniquement en présence d’Oulimata DIOUM, pour des raisons de sécurité. On lui avait fait comprendre que j’avais décidé de le tuer pour m’avoir accusé, et qu’il avait intérêt à contacter les services de la Gendarmerie. Il m’expliqua de long en large ce qui s’était passé dans le bureau du Général, le vendredi 13 juin vers 15 heures, le piège que le Général leur tendit vers 20 heures à son domicile, les tortures qu’ils subirent toute la nuit du 13 au 14 juin 2007 et la descente des Gendarmes dans leur bureau de la rue Sandinièry, pour détruire les ordinateurs et brûler les documents.

Il me fit comprendre avoir échappé à une mort certaine par la promptitude de l’intervention du Président de la République pour exiger leur libération. Il était désolé pour moi et pour la décision me concernant, mais il avait agi sur instructions de personnes tapies au palais, qui voulaient profiter du Général. Il ne voulait pas entamer une collaboration quelconque avec moi pour faire triompher la vérité. Sa vie était selon ses amis en danger des deux côtés, les Gendarmes le menaçaient de représailles et ses Commanditaires ne voulaient, en aucun cas, que  leurs actions n’éclatent devant le public, comme devant le Président de la République.

Oulimata DIOUM, soi-disant croyant, organisatrice de pèlerinage à la Mecque, et aussi amie personnelle du nouveau Premier Ministre, Aguibou SOUMARE, promit de prendre l’affaire en mains si je voulais bien oublier son Amdy. Elle ferait part au Premier Ministre de toute l’affaire et était prête à me conduire devant ce dernier, pour témoigner de mon innocence dans l’attaque contre les agents d’Insa.
Je lui fis confiance et, très serein, j’envoyai, par des amis, quatre lettres au Président WADE pour clamer mon innocence et demander l’ouverture d’une enquête officielle, sur ce qui avait conduit l’Etat et le Président de la République à me relever de mes fonctions de Haut Commandant en Second de la Gendarmerie.
Ces lettres furent acheminées par des personnes ressources vers le Président. Il refusa d’entendre quelqu’un lui parler de moi. Son propre neveu, Fodé SAKHO, qu’un ami venu de France obligea à porter ma lettre, se vit fermer les portes de son oncle dès qu’il se fut agi de moi. Le père WADE m’en voulait, il m’accusait de haute trahison et de complot contre la Sûreté de l’Etat. On renforça sa haine en me présentant comme un spécialiste de la subversion, qui était déjà en connivence avec Idrissa SECK, lorsque ce dernier était aux affaires.

Cette connivence avait alors poussé à m’éloigner vers la Guinée. Le Populaire titra « SCANDALE DANS LA GENDARMERIE », en faisant état d’un détournement de deux milliards, qui a amené l’Etat à ouvrir une enquête sur la Gendarmerie. Le journal avança que le HCS, sanctionné et relevé de ses fonctions à la suite du scandale, clamait son innocence. L’article fit gros effet, et ce jour-là, le Populaire fit un deuxième tirage pour satisfaire la clientèle. Le Général devait présider une Cérémonie au Mess de la Gendarmerie vers 09 heures en présence de plus de mille Gendarmes. Chaque Gendarme vint avec son Populaire en mains.

Les Officiers eurent beaucoup de difficultés pour faire cacher le journal. Les Gendarmes brandissaient le journal comme une quête de vérité. La cérémonie ne put se tenir tellement la honte du Général était évidente et intenable. Je décidai qu’il était important et légitime de sauvegarder mon honneur devant les plus hautes autorités de l’Etat, surtout devant le Président de la République. Je reçus l’aide prestigieuse et inestimable de la fille de Sergine Mourtada MBACKE, Astou Thierno. Elle me conduisit, malgré mes réticences, chez le Colonel Malick CISSE, Conseiller spécial du Président de la République.
Très bouleversé par mes explications, le Colonel promit de dévier son voyage sur les Etats-Unis, pour retrouver le Président, en vacances en Suisse, et lui exposer personnellement mon cas et les mensonges dont j’avais fait l’objet. Il tint promesse, rencontra WADE à Genève pour moi, me le passa même au téléphone. WADE promit de régler mon problème dès son retour et, qu’en conséquence, il me mettrait en rapport avec son Directeur de cabinet, le Ministre d’état Zaccaria DIAW.

Effectivement, je reçus un appel de Zaccaria DIAW, qui me dit avoir reçu des instructions du Président de la République me concernant. Il promit de me faire une lettre réponse, sur demande du Président, pour bien signifier la réception de mon courrier et la prise en compte de mon cas. Il était en dehors de Dakar pour des raisons officielles mais il prendrait toutes les dispositions dès son retour. Je ne reçus jamais cette lettre réponse. Pourquoi, je n’en sais rien. Toutes mes tentatives pour rencontrer Zaccaria DIAW, que je connais personnellement, ont échoué pour des raisons qui me sont inconnues. Mon frère, qui a été longtemps sous ses ordres, se vit refuser une audience, dès qu’il sut qu’il voulait le voir pour traiter de mon cas.

Entretemps, le Haut Commandement de la Gendarmerie a mené toute sorte d’actions de représailles contre moi, pour prouver ma faute, me tenir en respect, me clochardiser et, surtout, salir mon nom et mon honneur en m’accusant de tout ce qui pouvait justifier ma mise à l’écart. On me refusa un véhicule de service alors que même les lieutenants qui venaient de sortir d’école en avaient. Dièye, qui venait de me remplacer ne voulut aucun de mes véhicules de fonction, ni la Safrane, encore moins la 4X4 Nissan Pathfinger, pourtant neuve. Il préféra prendre, en toute modestie et signe de soumission, la Peugeot 407 que la femme du Général avait fait remplacer par une petite Mercédès, et la Toyota Land Cruiser, des magouilles du Ministre des Forces Armées.

Le Général mentit à mon ami Souaré, qu’il avait sollicité pour intermédiation entre lui et moi. Ce dernier commença à m’accuser de tout et de rien. Il me demandait de faire preuve de patience le temps que le Général me rétablisse dans de bonnes fonctions. Selon lui, il n’y avait aucun nuage et que des personnes avaient comploté à son insu contre nous deux, et que je devais patienter. Je lui répondis que je n’avais pas à patienter face à un menteur et un lâche qui m’avait sacrifié face à ses propres fautes. Le général avait menti pour sauver sa peau. Il ne voulait même pas me donner un véhicule, alors qu’il savait que je n’en avais pas. Il me rétorqua que le Généra l lui avait fait comprendre que c’est moi qui avais renoncé à tout, villa, maisons, pour juste lui faire la guerre.
Souaré était convaincu que c’est moi qui foutais le bordel, et refusais tout compromis avec le Général, que je cherchais, par tous les moyens, à faire relever pour me venger. Souaré, manipulé, condamnait mon attitude et me jugeait très négatif dans la recherche de solutions. Il ne voulut rien comprendre et prit fait et cause pour le Général. Je mis un terme à cette amitié, très au loin de nos réalités et quelque peu intéressée par les promesses faites par le Général. Beaucoup d’Officiers et de Sous-officiers qui tinrent à me rencontrer subirent les foudres du Général. 80% des Officiers supérieurs durent changer de poste pour marquer la "déazizification".
Ils furent, la plupart du temps, relevés de leur commandement et placés dans des positions sans commune mesure avec leur compétence. Le premier à payer son amitié avec moi, fut l’Adjudant-chef Kandji, Commandant de la Brigade de recherche de Dakar, il fut convoqué dans le bureau du Général pour s’entendre reprocher un manque total de loyauté, et de complot avec un Officier, qui avait maille avec l’Etat. Il fut mis dans le Contingent Haïti pour l’éloigner de ma sphère d’influence. Le second, pris dans les mailles du Général, fut le Major Abdoulaye SIDIBE, un ami d’enfance, d’un lien plus que familial de par l’amitié séculaire entre nos deux mères. Il est, sans ménagement, muté en Casamance en qualité d’Adjoint. SIDIBE, à des mois de la retraite, ne pouvait bouleverser sa vie familiale ainsi. Kandji, en parfaite entente avec moi, accepta le sacrifice de perdre son commandement et d’être éloigné de sa famille pendant un an. Le chantage qu’on lui fit le laissa de marbre, malgré mon insistance de négocier son cas. Il ne pouvait pas en être de même du Major SIDIBE et je dus reprendre contact avec Souaré, de Paris, pour parlementer.
Le Général comprit très vite me tenir par SIDIBE, que je ne pouvais laisser sacrifier. Il signa l’ordre de mise en route dans les 48 heures. Je ne pouvais, la conscience tranquille, laisser SIDIBE partir et je fis ce que je n’aurai peut-être jamais fait pour un autre. J’envoyai au Général l’arme la plus redoutable que j’avais pour ma défense : mon seul lien avec le Président de la République. Le Colonel Malik CISSE accepta d’intervenir auprès du Général pour le cas de SIDIBE. Effectivement, la mutation de SIDIBE fut annulée après cette rencontre.
Je ne pus plus jamais reprendre le contact avec le Colonel Malick CISSE. Il m’appela pour me faire comprendre que lui-même était en danger, du fait de notre relation, qu’il ferait tout pour me trouver un poste à l’extérieur du pays, mais qu’il ne pouvait plus s’occuper de mon cas. Les portes de la Présidence me furent à jamais fermées et je subis de plein fouet les attaques de la Gendarmerie, de toute l’Institution, pour me faire peur, faire peur à ma famille et même attenter à ma vie. Je fus placé sous surveillance constante d’éléments de la section de recherches gendarmerie qui, grâce à des scooters, prirent en relais 24 heures sur 24 mes moindres déplacements. Certains en faisaient part aux quelques militaires qui pouvaient me rester fidèles.
Dieye prit sur lui-même de protéger le staff direct que j’avais, il les maintint dans les mêmes postures, dans son cabinet. Il alla même jusqu’à conserver mon chauffeur comme chauffeur de fonction et le Chef SALL, qui était mon secrétaire depuis la DIRCEL, comme secrétaire particulier. Le seul qui eut à subir l’assaut du Général, fut le gendarme Pape Samba FALL, mon deuxième chauffeur. FALL fut convoqué chez le Général pour s’entendre demander le nom et l’adresse des marabouts qui me protégeaient. FALL rigola de la question et certifia au Général que le Colonel NDAO n’avait pas de temps ni d’argent à consacrer aux marabouts.
Le Général lui demanda de rester mon chauffeur et de le renseigner sur mes relations, mon comportement et mes allées et venues. FALL refusa toute collaboration avec l’équipe du Général, les pressions de son père , cousin du Général n’y firent rien. FALL fut affecté pour indiscipline à la Légion de gendarmerie d’intervention. Beaucoup de Commandants de brigades perdirent leur commandement, considérés à tort, comme des partisans du Colonel NDAO. Il suffisait de quelques médisances d’un rival qui convoitait le poste, et le tour était joué. Fort de tout cela, je rompis les amarres avec la gendarmerie. Je ne restais en contact qu’avec le Colonel TINE, qui était mon ami et qui s’en foutait royalement de ce que le Général 178 pensait de moi. Il subit plusieurs attaques directes et subit quelques misères et menaces mais, il tint bon. De guerre lasse, le Général ne se mêla plus de nos relations et l’éloigna des centres d’influence
Vendredi 25 Juillet 2014




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