Amadou Diallo, Consul général du Sénégal à Paris : " L'élection de Macron (...) Nous avons plus de 55 000 inscrits sur les listes électorales (...) Les querelles dans l'APR n'honorent personne "

Amadou Diallo, Consul général du Sénégal à Paris, est revenu sur l'élection d'Emmanuel Macron à la tête de la République française et son impact sur les étrangers vivant en France. Il a aussi évoqué avec nous la gestion du Consulat général du Sénégal à Paris avant de nous parler des inscriptions sur les listes électorales et les difficultés rencontrées. Il nous a aussi parlé des querelles internes notées dans le parti du président Macky Sall dont il est membre fondateur. ENTRETIEN...


Excellence, comment avez-vous vécu l’élection d’Emmanuel Macron comme nouveau président de la République française?

D’abord mes félicitations au nouveau Président élu qui, je suis sûr, dans le sillage du Président Hollande, va davantage consolider les relations entre nos deux pays amis.
Pour répondre à votre question, bien entendu, j’ai suivi avec beaucoup d’intérêt cette élection, car comme vous le savez, nous avons une forte communauté sénégalaise qui vit dans ce pays. Et si je me réfère au sentiment global de nos compatriotes, c’est rassurant pour eux que Macron soit élu. Je suis aussi fier que des compatriotes tels que Sibeth Ndiaye, François Ndiaye et d’autres aient participé à la victoire du candidat Macron. Ils défendront sans doute les intérêts français, mais ils se rappelleront aussi de leurs origines sénégalaises.

Beaucoup d'africains étaient réticents vis-à-vis de Marine Le Pen. Peut-on s'attendre à une autre forme de coopération avec l’ère Macron ? 

Ce ne sont pas seulement les africains ou les personnes d’origine étrangère qui sont réticents au Front national. Il faut préciser que c’est le peuple français dans sa majorité qui rejette les idées de l’extrémisme. Le résultat du second tour des élections présidentielles est assez expressif du refus des français d’être dirigés par ceux-là qui portent un discours xénophobe.

Comment se porte votre Consulat ?

Comme un charme... (rires !!!)
Nous sortons de 4 mois très intenses concernant les activités d’inscription sur les listes électorales. Rendons grâce à Dieu, cela s’est bien passé malgré beaucoup de craintes exprimées au début.
Nous essayons de répondre le plus favorablement aux attentes des usagers en améliorant la qualité de nos prestations. Il y’a certes des acquis, mais nous avons encore du chemin à faire pour répondre en qualité et en temps aux demandes très fortes de services consulaires.

Beaucoup de nos compatriotes vivant hors du pays se plaignent du travail des Consulats qui ne prennent pas souvent en compte leurs problèmes. Est-ce le cas aussi pour vous notamment pour les demandes de visa ?

Nos compatriotes sont très exigeants et cela nous oblige à encore et toujours améliorer la qualité des services fournis. Depuis plus de 4 ans que je suis en poste, je n’ai qu’un objectif, le même tous les jours, à savoir veiller à satisfaire tout usager qui entre dans cette « maison du Sénégal » en France. C’est ce qui justifie la création de la charte interne de valeurs
« Sitoe Diatta » ci-joint.

Par votre question, vous me permettez d’évoquer quelques services consulaires novateurs.

Le passeport est délivré en 3 jours maximum et le jour même pour les personnes venant de province et de pays frontaliers. C’est une innovation majeure des autorités sénégalaises.
Pour toute démarche de transcription de naissance, de déclaration décès ou de mariage, les documents sont fournis le même jour sauf pour ce qui relève du mariage où la procédure de publication des bans nous impose des délais incompressibles.

Nous avons rétabli le service social qui est resté inactif pendant plus de 10 ans. Ceci nous permet d’accueillir de plus en plus des personnes fragilisées dans leur quotidien de migrant dans un pays où le taux de chômage a atteint un taux record. Nous avons créé une permanence juridique depuis septembre 2013 et qui fait intervenir un avocat d’origine sénégalaise, inscrit au barreau de Paris toutes les deux semaines. Cette prestation de service nous permet de mieux orienter nos compatriotes dans les préfectures françaises.

Nous avons également un service juridique, disponible tous les jours et totalement gratuit.
Pour nous rapprocher de la communauté sénégalaise, nous avons développé depuis 2013, le concept de « Consulat mobile » qui nous a permis de parcourir les localités les plus éloignées de Paris et en installant des PIC « Points d’information consulaire ». Les villes qui souhaitent obtenir un PIC (personne relais en général président associatif) peuvent nous adresser un courrier. A ce titre nous avons un bureau des associations (415 inscrits) et délivrons un agrément afin de mieux suivre leurs activités.

Les demandes de visa sont adressées au Ministère de l’Intérieur seul habilité à donner l’autorisation de sa délivrance sur avis après une procédure de consultation. Un projet de réduction de la durée de traitement du visa est en cours.

Quelles sont les principales préoccupations de nos concitoyens résidents en France ?

Quand on arrive pour la première fois en France pour s’y installer, la préoccupation principale reste l’obtention du premier titre de séjour qui vous autorise à travailler. Nous intervenons beaucoup auprès des préfectures pour attirer leur attention particulière sur certains dossiers qui méritent un traitement favorable conformément à la convention bilatérale de 2006. Aussi, il y a une demande sociale de plus en plus forte de nos compatriotes confrontés à des difficultés de la vie. Nous avons une commission sociale qui se réunit régulièrement pour apprécier ses demandes dont beaucoup de femmes seules.
Les services de passeport et de carte d’identité nationale sont très sollicités par nos compatriotes.
Le FAISE (Fonds d’appui à l’investissement des sénégalais de l’extérieur-version femmes résidentes à l’étranger) a connu un grand rush avec des centaines de demandes enregistrées.
L’acquisition d’une maison favorisée par une tentative de retour au pays est aussi une demande d’information régulière qui pousse nos compatriotes à venir nous voir afin de sécuriser au mieux leur investissement.

La qualité de l’accueil est souvent décriée dans les représentations diplomatiques et consulaires. Qu’en pensez-vous?

Nous sommes au courant de ses remarques des usagers et nous en prenons compte. L’accueil est fondamental pour un service consulaire. A travers cet accueil, nous véhiculons l’image de notre pays et parfois même de notre conscience d’agents de service public. Ceci prend en compte particulièrement l’accueil physique des locaux (façade, propreté, éclairage, signalétique interne...) et le personnel en contact avec les usagers.
Nous avons beaucoup évolué sur la qualité d’accueil et avons amélioré notre écoute et disponibilité vis-à-vis de l’usager.
Nous avons mis en place un tableau d’affichage, un organigramme de nos locaux, des toilettes publiques propres, une signalétique à tous les étages, des salles d’attente aménagées avec dispositif de gestion de file d’attente et puis un site internet avec informations utiles et régulièrement mises à jour, un agent affecté au standard téléphonique...

Les élections, c'est pour bientôt, d'ailleurs on a clôturé les inscriptions sur les listes électorales. Quel bilan en tirez-vous?

Nous avons plus de 55 000 inscrits et presque 45 000 à Paris. Nous avons inscrit beaucoup de jeunes issus de l’immigration et avons parcouru plusieurs villes en France. Pour rappel, en 2011 nous avions 41000 inscrits dans toute la France. Ceci est une volonté du gouvernement du Sénégal qui a mis des moyens techniques et financiers nécessaires afin d’impliquer la diaspora dans les prochaines élections, notamment les législatives de juillet prochain qui permettront d’élire 15 députés dédiés.

Vous n'avez pas eu des problèmes de panne de machine, des commissions insuffisantes pour gérer tous les Sénégalais de France? 

Il y a eu certes quelques difficultés de coordination, mais Dieu merci, dans l’ensemble nous avons plus 34% d’inscrits comparés au dernier fichier. Ce résultat est le fait des moyens humains et matériels déployés complétés par une bonne organisation et une volonté des agents à accomplir leur mission parfois à des heures avancées dans la soirée.

Vous êtes de l'APR, quelle sera votre contribution pour les prochaines élections?

Les responsables de la DSE France sont mieux placés que moi pour répondre à cette question. Cela dit, la carte électorale en France s’est beaucoup agrandie en nombre (55 000) et en répartition territoriale. Aussi, il y a eu un nombre important de jeunes nés en France qui se sont inscrits.

L'APR est soumise à des querelles de positionnement qui minent le parti. Cette division n'entrave t-elle pas la démarche de votre parti?


L’APR a été créée par le Président Macky pour rassembler, unir dans une démarche républicaine tous les sénégalais pour redonner de l’espoir à ce pays dont l’image avait pris un sacré coup auprès de nos partenaires au développement. C’est une alliance qui s’affranchie de frontières idéologiques et de barrières politiques. Elle se repose uniquement pour la lutte contre le fatalisme du sous-développement et de croire que notre pays a tous les atouts pour se développer. C’est tout le sens du PSE.
Nous sommes à la veille d’élections cruciales pour donner une majorité parlementaire à la politique du Président Macky Sall. Effectivement le parti en ce moment offre un spectacle de division médiatisée qui n’honore personne. Nous devrons taire les querelles et ouvrir le parti, encore ouvrir le parti et toujours ouvrir le parti afin d’accueillir toutes les sénégalaises et tous les sénégalais qui croient au développement de notre pays. 
Mercredi 17 Mai 2017




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