Affaire Assane Diouf : Les incongruités d’une arrestation pour terrorisme commanditée par le Sénégal

C’est l’une des attractions de Facebook section sénégalaise qui donné l’information. A en croire une certaine Françoise Hélène Gaye, « Assane Diouf, l’ennemi public n°1 de Macky Sall, est arrêté ce vendredi ». Mais, le motif de l’arrestation de Assane Diouf est trop gros pour passer inaperçu et mérite qu’on s’y attarde. Décryptage.


Affaire Assane Diouf : Les incongruités d’une arrestation pour terrorisme commanditée par le Sénégal
Dans son live, la jeune dame qui a donné la parole au « fou furieux » de Domeram TV a expliqué que « c’est suite à un signalement, pour terrorisme, que Assane Diouf a été cueilli et placé en détention par les services américains de l’immigration. » Si l’annonce de l’embastillement de Assane Diouf parait crédible, sa mise en détention, pour terrorisme, par les services de l’immigration pose un sérieux problème.

 


En Occident, aux Usa comme en Europe, le terrorisme ne relève pas des services de l’immigration. Les affaires de terrorisme sont tellement sérieuses que ce sont des unités spéciales qui sont chargés de ces dossiers-là. Si l’insolent Assane Diouf était arrêté pour des soupçons de terrorisme, c’est le FBI qui aurait hérité du dossier. Et ses contacts avec l’extérieur auraient été immédiatement suspendus, son domicile comme ses lieux de fréquentation perquisitionnés, son entourage mis aux arrêts au Sénégal comme en Amérique.

Lorsque l’on est en garde à vue, on ne garde pas son téléphone avec soi….

Hélène Françoise Gaye qui a eu, en direct, Assane Diouf au téléphone pour qu’il raconte sa mésaventure aux followers n’aurait jamais réussi à lui parler; tant que la mesure de garde à vue qui frapperait Assane Diouf, pour terrorisme, n’ait pas été levée. Et, une personne arrêtée pour terrorisme est isolée complètement pendant 96 heures, voire jusqu’à 144 heures.

Pourtant, c’est depuis vendredi, seulement, qu’on dit que Assane Diouf a été arrêté et le voila qu’il dispose toujours de son téléphone. Depuis 2000, la section anti terrorisme du FBI – comme tout le FBI d’ailleurs- n’arrête pas un individu, pour terrorisme, dès la première dénonciation.

Aussi, le Sénégal qui est un partenaire important du FBI ne prendra jamais le risque de donner, sciemment, le signalement de Assane Diouf aux Américains avec la notice terroriste. Parce que après vérification, quand le FBI découvrira que les services sénégalais lui ont menti ou ont essayé de le manipuler, les Américains enlèveront, tout de suite, du crédit à la valeur du renseignement sénégalais.

La crédibilité des services de renseignements sénégalais en jeu…

Et dans le classement de fiabilité des services de renseignements, le Sénégal serait la risée du monde. Ses alertes ne vaudront plus rien. En ces périodes troubles de l’histoire, personne ne prendra ce risque.  Quelles que soient les injures de Assane Diouf, quelles que soient la gravité de ses actes délictuels, aucun officier de renseignements sénégalais ne prendrait ce risque de dynamiter tout un système que de braves gens au péril de leur vie ont construit, des années durant.

Les services de renseignement qui disposent  d’informations sensibles sur un individu, pour sa présumée participation à des projets terroristes, ne procèdent pas automatiquement à son arrestation. Ce sont des mesures de surveillance qui sont mises en place pendant des mois voire des années pour vérifier l’exactitude de l’information et essayer d’identifier les présumés complices de cet individu. Avant de démanteler tout le réseau. Ensuite, ces personnes sont mises à l’isolement le plus complet. C’est comme ça que ça se passe partout.

C’est l’antiterrorisme qui s’occupe des dossiers terroristes, pas l’immigration…

En Europe où tous les spécialistes du renseignement comme de l’antiterrorisme ont vu travailler des agents spéciaux, quand un service comme la police aux frontières -PAF- ou les gardes pénitentiaires ont des soupçons de terrorisme sur un individu, ils donnent directement son signalement aux services de l’antiterrorisme -La DCRI est logé à Levallois Perret en France- qui ouvre une enquête sur la personne.

Et si la personne est arrêtée, un jour, elle ne passe pas devant un parquet ordinaire. Ce sont des parquets antiterroristes qui se chargent du dossier, ces présumés terroristes font face à des juges antiterroristes et placés en détention dans des secteurs de haute sécurité des prisons qui les accueillent. A l’isolement complet, sans Facebook, sans téléphone.

Le cas Assane Diouf relève plutôt d’arrestation pour séjour irrégulièr. Quand une personne est arrêtée pour clandestinité, elle est directement placée dans un centre de rétention. La bas, elle peut disposer de son téléphone et communiquer avec l’extérieur; le temps de passer devant un juge. C’est au sortir de cette rencontre que le juge décide l’interdiction du territoire ou non.

Assane Diouf a réussi à se faire passer pour un martyr, les Usa ne l’extraderont pas….

S’il décide que la personne en situation irrégulière ne peut plus séjourner sur le territoire, c’est à ce moment-là que le clandestin est acheminé à bord d’un avion pour être expulsé. Si elle ne veut pas être expulsé, la personne arrêtée -pour séjour irrégulier dans un pays-, peut s’opposer à son expulsion.

Dans ce cas, il lui suffit juste de prétexter courir des risques réels de mort si jamais il retournait dans son pays. Assane Diouf a passé toute cette semaine à raconter, à ses suiveurs, qu’il était convoqué par un tribunal sans jamais dire clairement l’objet de ces convocations.

Et tout porte à croire que c’est pour son séjour irrégulier qu’il l’a été. Cette arrestation survenue ce vendredi est la suite logique de ses incessantes convocations en vu de son expulsion des Etats Unis. Et Assane Diouf a, maintenant, toutes les chances pour que les Usa lui accordent la Green Card.

La conséquence de ses diatribes, à l’encontre du président Macky Sall comme d’une bonne partie de l’entourage présidentiel, peuvent lui servir de preuves réelles pour espérer bénéficier des dispositions de la convention de Genève qui fait obligation aux Etats de lui protéger.

Dans quelques années, il ne pourra plus être inquiété pour les insultes contre Macky Sall…

Il peut, face au juge, dire sereinement que l’expulser vers le Sénégal équivaudrait à le condamner à mort. Aucun Etat de droit ne voudra prendre le risque de conduire Assane Diouf, pour le livrer à ses ennemies. Surtout que nos régimes sont vus en Occident comme des barbares, nos dirigeants des voleurs, des dictateurs.

Contrairement aux allégations de la dame Françoise Hélène Gaye, qui veut que « Macky Sall ait monté ces graves accusations pour obtenir l’extradition de Assane Diouf » (sic), si c’est pour des faits de terrorisme que « l’ennemi N°1 de Macky Sall » a été arrêté, le jour où il sera libérable des geôles américaines, -parce qu’il y resterait très longtemps-, Macky Sall ne sera plus le Président du Sénégal. Et les insultes, proférées à son encontre comme à l’endroit de son entourage, seront couvertes par la prescription. Assane ne pourrait plus être poursuivi pour ces délits mineurs.

Babacar Touré

Journaliste, écrivain et Directeur de Publications de Kewoulo.info
Samedi 19 Août 2017




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