AUDIT 2015 DE L'ARMP SUR LES MARCHÉS PUBLICS : Aprosi, nébuleuse autour d'un gré à gré de 22 milliards de FCFA

Les cabinets Bsc, Grant Thorton, Kmpg et Mamina Camara ont "fouillé" la passation des marchés publics de certaines autorités contractantes à la demande de l'Autorité de régulation des marchés publics (Armp). Libération livre un premier survol de ces rapports dont certains sont tout simplement explosifs.


AUDIT 2015 DE L'ARMP SUR LES MARCHÉS PUBLICS : Aprosi, nébuleuse autour d'un gré à gré de 22 milliards de FCFA
A l'Aprosi par exemple, les auditeurs ont soulevé une nébuleuse sur un marché de gré à gré de plusieurs milliards de FCFA.
En effet, l'examen de la procédure d’attribution du marché par entente directe de la réalisation clé en main de la plateforme industrielle de Diamniadio, attribué à CGCOC, pour un montant de 19 705 090 330 F CFA HTHD (50% en USD, soit 17 995 537 USD et 50% en F CFA, soit 9 897 545 165 F CFAHT HD), a permis de noter qu'après l'avis défavorable de la DCMP sur la requête formulée par l’APROSI, aux fins d’obtenir l’autorisation de passer ce marché par entente directe, l’Autorité Contractante a saisi l’ARMP, pour obtenir cette autorisation et informer le Premier Ministre, aux fins de certification par ce dernier de la nécessité de poursuivre la procédure d’attribution, en vertu de l’article 76 du CMP.
Par décision N°027/15 en date du 4 février 2015 in fine, l’ARMP « autorise l’APROSI, à titre exceptionnel, à conclure par entente directe avec la société CGC Overseas Construction Group Co Ltd, le contrat relatif à la construction de la plateforme intégrée de Diamniadio ». Dans l’exposé des faits, le CRD évoque la lettre N°00111 PM/CAB/CS.GOUV.SD du 3 février 2015, certifiant que la signature du contrat avec la société chinoise CGC Overseas Construction Group. Co. Ltd (CGCOC), doit se faire pour des motifs d’intérêt général, conformément à l’article 76 du Code des marchés publics (Cmp).
Les auditeurs signalent que l’article 16-02.b) du contrat note qu’ : « au titre d’avance exceptionnelle sur fournitures à très longs délais et onéreuses, le Maitre d’ouvrage pourra accorder également, une avance au maximum de 75% de la valeur des fournitures, sur présentation des pièces justificatives accompagnées d’une caution de garantie de remboursement, cette avance sera déductible sur les décomptes à venir, au même titre que l’avance de démarrage ».
Ce taux de 75 % n’est pas conforme au taux prévu dans l’article 95-3 du CMP, qui prévoit au titre des avances sur approvisionnement, un plafonnement à 50% du montant du contrat d’achat ou de la commande considérée.
Toujours d'après les auditeurs, la garantie de restitution d’avance sur matériel et matériaux, délivrée par ECOBANK, est plafonnée à 1 020 937 500 F CFA alors que les avances faites à ce titre au titulaire du marché, se chiffrent à 1 249 178 000 F CFA, soit un montant de 228 240 500 F CFA non couvert. Une garantie complémentaire aurait dû être exigée au titulaire avant le paiement de l’avance. Il s’y ajoute qu’à l’exception de la commande faite au fournisseur MAMUT, pour 175 312 000 F CFA, les justificatifs des commandes et les contrats ne sont pas classés dans le dossier de marché. L’article 20 du contrat prévoit une retenue de garantie de 10% sur les paiements, en violation de l’article 118 du CMP qui limite le taux à 5% du montant des paiements.
A l’exécution c’est ce taux de 5% qui a été appliqué ; il convient de mettre en cohérence, les documents de marchés avec la règlementation.
Selon le rapport, un décompte N° 3 a été établi pour la période allant du 10 juillet 2015 au 8 août 2015, alors qu’un ordre de service de suspension des travaux avait été notifié au titulaire, en réponse à sa requête au motif que la pluie empêchait la poursuite des travaux, pour la période allant du 15 juillet au 15 août 2015.
La période couverte par le décompte, ne correspond pas à une période d’activité, pouvant justifier l’émission de ce décompte. La même observation est valable pour le décompte N°5, établi pour la période allant du 3 août 2015 au 10 septembre 2015, alors qu’un ordre de service de suspension des travaux a été notifié au titulaire du marché, pour la période allant du 1er au 30 septembre 2015.
Il convient de veiller à la cohérence interne des documents de marché car les travaux sont censés être suspendus, du 15 juillet au 15 août 2015 et du 1er au 30 septembre 2015. Des modifications ont été notées dans la devise de règlement de la quote-part en dollars, sur les dé- comptes N° 6, N° 9 et N°10, sans avenant de modification des conditions initiales de paiement du marché.
La différence de change négative cumulée est estimée à 103 880 191 F CFA. Seule la première avance sur approvisionnement de 103 125 000 F CFA, payée en septembre 2015, a été récupérée sur le décompte N°7, alors que d’autres avances sur approvisionnement estimées à 1 015 327 500 F CFA, avaient été facturées et payées.
Les avances sur approvisionnements doivent être récupérées, au même rythme que l’avance forfaitaire de démarrage. Les décomptes N°8 à N°13 n’ont pas été visés par le Maitre d’œuvre qui est censé valider lesdits décomptes, avant paiement.
Pire, le montant cumulé des travaux au 8 juillet 2016, se chiffre à 18 318 107 USD et 10 074 958 893 F CFA, pour des travaux dont le coût initial était estimé à 17 995 537 USD et 9 897 545 165 F CFA, induisant un surcoût de 322 570 USD et 177 413 728 F CFA, soit un dépassement global de 354 827 000 F CFA, sans ordre de service.
"Ce dépassement ne doit pas être payé dans le cadre du marché ; il peut cependant donner lieu au paiement d’une indemnité, sur la base des dépenses réelles encourues. Nous précisons que l’entreprise aurait dû aviser le maître d’œuvre un mois au moins à l’avance, de la date probable à laquelle le cumul des travaux atteindra le montant total du marché, à charge pour le maître d’œuvre, de lui notifier un ordre de service d’arrêt des travaux, au moins dix jours avant cette date ou un ordre de service de poursuivre les travaux. A défaut d’ordre de service d’arrêter les travaux, ils doivent être poursuivis dans la limite de 5% du montant du marché, qui est facturé à prix global et forfaitaire", selon les auditeurs.
Samedi 21 Janvier 2017




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